Critiques

Mendela Mediebe assure

Jacobin Yarro est revenu sur les planches avec un ancien projet et une nouvelle comédienne au point. Pour un spectacle intéressant qui scrute les rapports homme et femme.


Lorsque le metteur en scène Jacobin Yarro enrôle la jeune Mendela Bediebe comme interprète  de Tant que durera l’homme,  adaptation du roman d’Eaux  Douces de  Fabienne Kanor, la pièce en question  a déjà des années de représentation derrière elle, le succès toujours au rendez-vous, avec cinq différentes autres comédiennes. C’est dire combien la tâche et le défi sont immenses pour la novice et le metteur en scène. Deux ans de travail, et au bout pas de quoi s’en plaindre au vu de la sixième représentation de Tant que durera l’homme par Badiebe, le 06 janvier 2017 à l’Institut français du Cameroun, antenne de Yaoundé.

Dans le rôle de Frieda, la comédienne, avec  beaucoup de sérénité, a tenu de bout en bout le monologue pendant près d’une heure. Sans laisser la possibilité aux spectateurs de se rendre compte des quelques rares baisses d’intensité de son jeu.

Derrière un rideau (probablement de chambre), on entrevoit  la silhouette d’une femme  qui tire deux coups de feu. La femme sort puis occupe l’avant-scène, un pistolet dans la main. «Je m’appelle Frieda, je viens de tuer un homme, et je m’apprête à me faire sauter la cervelle…». Tragique ! Ainsi Frieda entame  et se lance dans un monologue. Comme dans une reconstitution de faits, où souvenirs, explications et justifications se bousculent. Frieda épluche son histoire avec Éric qu’elle vient de tuer, histoire d’amour, de sexes jouis, manqués, cocufiés. Les lumières, les effets sonores et les musiques relatent tout aussi le psychodrame sans contrepoint ;  évoquant des digressions de temps, de situations, d’ambiance, de lieux de cette «histoire intime et féroce» qui tourne autour de «tout chemin de femme mène à l’homme», parfois jusqu’au trouble psychologique.

Ainsi l’aventure sentimentale qui s’est ouverte sur une scène de meurtre va s’achever sur une scène semblable, cette fois ci le suicide de Frieda : la silhouette  d’une femme derrière un rideau, couchée sur le dos, jambes relevées et écartées. La main tenant un pistolet pointé sur son sexe. Un coup de feu. Décidemment, le sexe de la femme serait-il sa cervelle ?

Si la mise en scène de Jacobin Yarro continue à emporter le satisfecit du public, c’est qu’il a toujours su trouver la perle, la bonne porteuse de l’interprétation de cette création,  et a su  transmettre aux différentes comédiennes qui ont joué Frieda la charge du rôle et du jeu scénique. Pour le cas de Mendela Madiebe, elle a apporté à cette œuvre une autre vibration et un tempérament particulier. A cet effet, s’agissant de la direction d’acteur, il nous semble que Bediebe gagnerait plus de liberté dans l’expression suggestive du corps et des gestes pour une pièce très libertine pour ne pas dire très sexuelle par moments.

On se réjouit  par ailleurs que la pièce ait obtenu une subvention du ministère des Arts et de Culture pour tourner au Cameroun. Autre heureuse nouvelle, Jacobin Yarro qui s’est trop confondu ces six dernières années avec Tant que durera l’homme,  a convié le public dans les prochains mois à sa nouvelle création, Tombeau, d’après une œuvre de l’écrivaine Léonaro Miano.

Martin Anguissa

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