Critiques

Barthélémy Toguo réenchante un métro parisien

La fresque réalisée par le plasticien camerounais à Château Rouge est inédite dans l’histoire de la capitale française. Elle a été inauguré le 17 octobre 2017.

Elle s’appelle Célébrations. Et occupe tout un pan de mur de la Station métro Château Rouge à Paris. Elle e a une dimension de 3 x 10m et est installée sur le quai rénové. A la suite de la décision d’une commission d’attribution pour l’habillage d’un pan de mur à l’intérieur de la station de métro parisien, le plasticien camerounais a réalisé cette œuvre qui frappe les regards lorsque l’on pénètre la station. Regards d’abord captivés par la taille et ensuite par le contenu.

S’agissant de ce deuxième aspect, l’œuvre se présente comme une forêt avec des arbres qui s’enchâssent les uns aux autres sans pour autant que l’un surplombe l’autre ou le menace. La fresque en céramique respire plutôt une harmonie que rendent singulièrement les feuilles qui sont tantôt assombries, tantôt claires. Les arbres, robustes et droits, ont à leurs sommets respectifs une touffe qui donne plutôt l’impression d’une racine. Ce d’autant plus qu’à la base, la plante pousse à partir du sommet d’une tête que l’on voit tantôt de profil, tantôt inclinée. Les têtes sont à la fois masculines et féminines et ne s’encombrent d’aucune chevelure.


Dans l’œuvre, l’homme est réduit à l’état infime alors que la nature a tous les droits via les arbres qui écrasent ce dernier dont on ne voit que la tête. Et si le temps était venu d’écouter la nature ? Voilà l’interrogation in fine de Barthélémy Toguo.

En regardant cette fresque, l’on remarque que le message principal de son auteur est de rappeler combien chacun a sa place dans ce monde qui a des allures de jungle. Chaque singularité étant un apport de richesse pour l’ensemble, où que l’on soit et malgré les conditions d’existence. Une sorte de cri qui résonne d’autant plus que dans l’environnement de cette station vivent des populations dont on peut aisément imaginer qu’elles sont reléguées à la périphérie d’un centre qui détient encore les commandes du navire vie. Mais où la vie a tout son sens et son plaisir comme on peut le voir au marché de poissons qui débouche sur l’entrée du métro ; ou encore dans les échoppes et autres salons de coiffure qui parsèment le quartier et suivent les rues adjacentes, s’allongeant jusqu’au métro Château d’eau en passant par Barbès. Un quartier que Toguo connaît bien pour y avoir vécu entre 1998 et 2002.

Pour ce qui est de la couleur, l’artiste a choisi un bleu spécial, mis au point en collaboration avec la Manufacture nationale de Sèvres et qui porte son nom, plus spécialement dans un atelier de peinture et d’émaillage de carreaux de grès. Une couleur qui a le don de bien porter une fresque qui a été inaugurée quelques semaines avant l’ouverture de la Cop 23 à Bonn ; une fresque qui peut être regardée également comme un cri en direction des maîtres du monde sur la question de la vie aujourd’hui et demain, vie esquintée par la course à l’industrialisation tous azimuts. Dans l’œuvre, l’homme est réduit à l’état infime alors que la nature a tous les droits via les arbres qui écrasent ce dernier dont on ne voit que la tête. Et si le temps était venu d’écouter la nature ? Voilà l’interrogation in fine d’un Barthélémy Toguo dont le travail franchit là en quelque sorte une barrière qui le sépare de l’humain ordinaire qui n’a pas souvent accès à ce que fait l’une des figures de la scène contemporaine actuelle dans le monde.

Parfait Tabapsi

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